04 - Chapitre 4 : Chasser les étoiles – le début de la quête astrale

04 - Chapitre 4 : Chasser les étoiles – le début de la quête astrale

Le chat noir avait parcouru toute la ville. Et même un peu plus. Lorsqu'il avait atteint la dernière bâtisse et franchi le dernier jardin, il ne s'était même pas rendu compte que le tumulte de la ville s'était peu à peu estompé, pour finalement s'éteindre.

Dans sa courses solitaire, les yeux rivés sur le soleil, il avait dû se rendre à l'évidence : il ne le rattraperait pas. Pas en une seule nuit, en tout cas.

Alors, il avait décidé de faire une pause, au bord de la route, à l'orée d'un monde qui lui était étranger.

 Il n'était pas vraiment habitué à la fraîcheur de la nuit.

Lui connaît les cafés tièdes, les ruelles familiales, les abris de fortune entre deux conteneurs. Ici, il était à découvert. Trop visible, trop vulnérable. Sa fourrure noire lui permettait l'avantage du camouflage naturel, mais les véhicules qui filaient encore sur la route l'éblouissaient cruellement. Traverser ici aurait été une folie : un faux pas, un coup de phare, et tout aurait pu s'arrêter.

Hors de question de cet aventurier voit sa fin ainsi. Il était capable de parcourir des kilomètres, de grimper des bâtiments immenses...  

Mais là, il avait besoin de repos. Il n'était pas invincible. 

Ses moustaches frémissantes, ses yeux jaunes parfaitement adaptés à l'obscurité, il cherche un abri. L'avantage d'être nyctalope c'est que la nuit n'était jamais totalement noire. 

Il fini par repérer l'endroit parfait : un arbre haut comme une petite maison et au feuillage dense et protecteur.

D'un lien souple et élégant, il s'agrippa au tronc et grimpa jusqu'à une grande branche, suffisamment stable pour lui offrir un poste de repos.

Évidemment, il se positionna dos à la route. Hors de question que les phares viennent troubler sa tranquillité.. 

Allongé là, il tenta de se détendre.
Mais ce n’était pas chose facile.

Le bruit des insectes, le frottement des feuilles agitées par le vent, le craquement du bois...
Le moindre son le faisait sursauter. Il était pourtant habitué à une foule de bruits. 

Ces sons isolés, discrets, lui faisaient l'effet de menaces invisibles.

Dans la ville, il était bercé par un fond sonore constant : klaxons, conversations, moteurs.
Ici, le silence avait des dents. Et pour la première fois, dans son imagination, le prédateur… ce n'était pas lui.

L'odeur de l'arbre le surprenait aussi.
Rien à voir avec les effluves de pots d'échappement, de vieilles poubelles ou de parfum bon marché.
Ici, ça sentait le bois brut.
Parfait pour se faire les griffes, soit dit en passant.

Finalement, il s'enroula en boule, adossé au tronc rugueux.
Il lève les yeux vers le ciel.

Et là, il fut frappé.

Noir, profond, infini.

Un ciel comme il n’en avait jamais vu.
Dans la ville, les lumières étaient trop fortes, et ses yeux trop sensibles.
Les étoiles lui étaient inconnues ... La ville ne dormait pas. Jamais, la campagne oui. 

Des milliers de lueurs blanches brillaient, comme autant de mystères suspendus.
Certaines étaient bleues, d’autres rosées. Par endroits, des traînées laiteuses formaient un chemin, et de temps à autre, une étoile filante fendait le ciel.
Un ballet céleste silencieux.

Il resta là, immobile, les yeux écarquillés.
Il se sentit minuscule.
Une poussière face à l’univers.

Un frisson le traversa.
Ce sentiment d’infinie petitesse aurait pu l’écraser.
Mais non.
Il releva le menton.
Il était peut-être petit, mais il était Chat Noir.
Et le ciel n’avait qu’à bien se tenir.

Il finit par s'endormir, emporté par la fatigue de sa course. Pourtant, bien qu'épuisé, sa nuit ne fut pas de tout repos. 

Il ne comprit pas tout de suite comment il était arrivé là.
Mais il avançait. Sur un chemin blanc, laiteux, lumineux, presque vivant.. Sous ses pattes, la matière semblait faite de lumière et de poussière.
Pas vraiment tangible, mais suffisamment réelle pour ne pas tomber.

Il savait qu'il s'agissait de la voie lactée.

Il savait aussi qu'il valait mieux rester dessus pour le moment. Autour de lui, les étoiles prenaient vie.
Les constellations s’animaient, formant des silhouettes galactiques : un dragon immense au regard d’onyx, un archer de lumière, un renard d’étoiles…
Des créatures issues du ciel lui faisaient signe, paisibles, distantes, irréelles.

Par moments, des débris d’étoiles flottaient tout autour de lui.
Quand deux d’entre eux se rencontraient, de minuscules explosions colorées illuminaient l’espace.
C’était un feu d’artifice silencieux, hypnotisant.

Il ne savait pas exactement où il allait.
Mais le chemin semblait tout tracé.
Et pour une fois, il n’avait pas envie de poser de questions.

Et c'est exactement ce qu'il ressenti lorsqu'il se réveilla de son étrange nuit. Le soleil se levait à l’est, caressant doucement la terre et les branches de l’arbre. Il lui fallut quelques secondes pour distinguer le rêve de la réalité. Le soleil naissant réchauffait ses pattes, mais quelque chose clochait.

Il redressa la tête. Cligna des yeux.

Devant lui, à travers le paysage, un chemin blanc, laiteux, lumineux…
Exactement comme dans son rêve, s’étendait entre les herbes et les collines.
Pas aussi net. Pas aussi pur.
Mais bien là.

Une trace céleste, posée sur la terre.

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